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cond, qui se lie intimement au premier, consiste dans la discussion des hypothèses de monogénisme ou de polygénisme, par rapport aux lois de l’évolution dans l’échelle zoologique. Pour vous donner une idée de mon abstention à cet égard dans cette publication, il me suffit de dire qu’aucune de ces deux questions principales de l’anthropologie n’a été même de loin l’objectif de mes investigations.

Le doute de la pensée troublée par le fameux to be or not to be, l’angoisse d’un cerveau en lutte avec lui-même, dans les abîmes de l’inconnu, voilà ce qui exprime le mieux l’état de l’esprit et du cœur de ceux qui s’appliquent à l’étude des anciens peuples de notre continent.

Il est vrai que j’ai rencontré de toutes parts des ressemblances manifestes et irréfutables entre nos antiquités et celles des autres peuples. Mais qui oserait pour cela désigner lequel des deux continents a été la métropole de l’autre ?

Avant tout et au dessus de tout, [je répète mes propres expressions dans ce livre], nous devons placer la vérité. À mon avis, en Amérique tout au moins, nous ne sommes pas en état de déterminer, tant que nous n’aurons pas de meilleures preuves, ce que l’on appelle des centres de création. Bien heureux si nous pouvions constater çà et là les points où les premiers hommes ont fait leur apparition. Cela deviendra possible à mesure que l’on découvrira des ossuaires ou des vestiges irrécusables du genre humain appartenant à la période quaternaire ou à toute autre époque si la science peut y rattacher, d’une façon authentique, les preuves qu’elle aura réunies.

Il faut maintenant que je vous donne une idée approximative de la division adoptée dans les travaux dont je vous présente ici le résumé. C’est pour cela que je dois suivre pas à pas les sujets en discussion dans l’ordre même où ils se trouvent. Or, le premier de ces sujets, le premier dans l’ordre adopté et aussi par son importance, est le mound de Pacoval, colline sacrée en forme de tortue et véritable nécropole à laquelle la nation entière venait confier les dépouilles de ses morts. Nous avons exhumé bien des objets précieux de cette colline, formée artificiellement sur le bord du lac Arary dont je suppose qu’elle était une île, comme elle l’est encore lors des crues périodiques du grand fleuve. Il y avait là plusieurs centaines d’urnes funéraires, qui renfermaient non plus des os rongés par le temps, mais des milliers de fragments de poterie, richement ornés, d’innombrables petits vases, beaucoup d’idoles et de figures décoratives fort remarquables.

Tout ce trésor archéologique présentait des vestiges d’une culture intellectuelle bien supérieure à celle des habitants actuels de la même région. Quel peuple était-ce ? D’où venait-il ? À quelles nations anciennes ou modernes se rattachait-il ? À quelle époque, surtout, s’est-il fixé en ce lieu ou y a-t-il passé ?

J’ai tâché de répondre à chacune de ces questions et j’ai essayé de leur donner une solution plausible, acceptable Mais combien d’obstacles se sont présentés à mon esprit ! Que de fois n’ai-je trouvé pour répondre à des doutes immenses que des doutes plus grands encore ! Un des caractères les plus singuliers de l’esprit de ce peuple étrange consiste dans la représentation symbolique de la tête humaine dont la physionomie tend à reproduire les types divers de ses ancêtres et à retracer en même temps toute leur histoire.

Il est fort possible que cette hypothèse ne soit pas de nature à rallier tous les jugements, au moins autant qu’il le faudrait pour la faire accepter. Je ne l’avance donc que pour la mettre en discussion, en présence des nombreux types de têtes reproduites au commencement du deuxième chapitre.

Je m’y réfère dans le passage suivant : « Les témoignages