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Cette heureuse circonstance, plus encore que la liberté politique, laissoit à l’esprit humain, chez les Grecs, une indépendance, garant assuré de la rapidité et de l’étendue de ses progrès.

Cependant, leurs sages, leurs savans, qui prirent bientôt après le nom plus modeste de philosophes ou d’amis de la science, de la sagesse, s’égarèrent dans l’immensité du plan trop vaste qu’ils avoient embrassé. Ils voulurent pénétrer la nature de l’homme et celle des Dieux, l’origine du monde et celle du genre humain. Ils essayèrent de réduire la nature entière à un seul principe, et les phénomènes de l’univers à une loi unique. Ils cherchèrent à renfermer dans une seule règle de conduite, et tous les devoirs de la morale, et le secret du véritable bonheur.

Ainsi, au lieu de découvrir des vérités, ils forgèrent des systêmes ; ils négligèrent l’observation des faits, pour s’abandonner à leur imagination ; et ne pouvant appuyer leurs opinions sur des preuves, ils essayèrent de les défendre par des subtilités.

Cependant, ces mêmes hommes culti-