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les mots dans une seule acception, devenue leur acception propre, entendoit je ne sais quelles fables absurdes, lorsque les mêmes expressions ne présentoient à l’esprit des prêtres qu’une vérité très-simple. Ils firent le même usage de leur écriture sacrée. Le peuple voyoit des hommes, des animaux, des monstres, où les prêtres avoient voulu représenter un phénomène astronomique, un des faits de l’histoire de l’année.

Ainsi, par exemple, les prêtres, dans leurs méditations, s’étoient presque par-tout créé le systême métaphysique d’un grand tout, immense, éternel, dont tous les êtres n’étoient que les parties, dont tous les changemens observés dans l’univers n’étoient que les modifications diverses. Le ciel ne leur offroit que des groupes d’étoiles semés dans ces déserts immenses, que des planètes qui y décrivoient des mouvemens plus ou moins compliqués, et des phénomènes purement physiques, résultans des positions de ces astres divers. Ils imposoient des noms à ces groupes d’étoiles et à ces planètes, aux cercles mobiles ou fixes imaginés pour en représenter les positions et la marche