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la réalité de ces conjectures, qui reculeroient encore les limites de nos espérances.

Telles sont les questions dont l’examen doit terminer cette dernière époque ; et combien ce tableau de l’espèce humaine, affranchie de toutes ces chaînes, soustraite à l’empire du hasard, comme à celui des ennemis de ses progrès, et marchant d’un pas ferme et sûr dans la route de la vérité, de la vertu et du bonheur, présente au philosophe, un spectacle qui le console des erreurs, des crimes, des injustices dont la terre est encore souillée, et dont il est souvent la victime ? C’est dans la contemplation de ce tableau qu’il reçoit le prix de ses efforts pour les progrès de la raison, pour la défense de la liberté. Il ose alors les lier à la chaîne éternelle des destinées humaines ; c’est-là qu’il trouve la vraie récompense de la vertu, le plaisir d’avoir fait un bien durable, que la fatalité ne détruira plus par une compensation funeste, en ramenant les préjugés et l’esclavage. Cette contemplation est pour lui un asile, où le souvenir de ses persécuteurs ne peut le poursuivre ; où, vivant par la pensée avec l’homme rétabli

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