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les préjugés avec les seules forces de sa raison ; enfin, pour échapper aux prestiges du charlatanisme, qui tendroit des piéges à sa fortune, à sa santé, à la liberté de ses opinions et de sa conscience, sous prétexte de l’enrichir, de le guérir et de le sauver.

Dès-lors, les habitans d’un même pays, n’étant plus distingués entre eux par l’usage d’une langue plus grossière ou plus raffinée, pouvant également se gouverner par leurs propres lumières, n’étant plus bornés à la connoissance machinale des procédés d’un art et de la routine d’une profession, ne dépendant plus, ni pour les moindres affaires, ni pour se procurer la moindre instruction, d’hommes habiles qui les gouvernent par un ascendant nécessaire, il doit en résulter une égalité réelle, puisque la différence des lumières ou des talens ne peut plus élever une barrière entre des hommes à qui leurs sentimens, leurs idées, leur langage permet de s’entendre, dont les uns peuvent avoir le désir d’être instruits par les autres, mais n’ont pas besoin d’être conduits par eux ; dont les uns peuvent vouloir confier aux plus éclairés le soin de