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qu’ils avoient reçues de l’Angleterre, n’ayant point à réformer un systême vicieux d’impositions ; n’ayant à détruire, ni tyrannies féodales, ni distinctions héréditaires, ni corporations privilégiées, riches ou puissantes, ni un systême d’intolérance religieuse, se bornèrent à établir de nouveaux pouvoirs, à les substituer à ceux que la nation britannique avoit jusqu’alors exercés sur eux. Rien, dans ces innovations, n’atteignoit la masse du peuple ; rien ne changeoit les relations qui s’étoient formées entre les individus. En France, par la raison contraire, la révolution devoit embrasser l’économie tout entière de la société, changer toutes les relations sociales, et pénétrer jusqu’aux derniers anneaux de la chaîne politique ; jusqu’aux individus qui, vivant en paix de leurs biens ou de leur industrie, ne tiennent aux mouvemens publics ni par leurs opinions, ni par leurs occupations, ni par des intérêts de fortune, d’ambition ou de gloire.

Les Américains, qui paroissoient ne combattre que contre les préjugés tyranniques de la mère-patrie, eurent pour alliés