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humain, dont aucun intérêt national ne devoit plus troubler la douce harmonie ; ces principes, séduisans par leur générosité comme par leur simplicité et leur étendue, furent propagés avec enthousiasme par les économistes français. Leur succès fut moins prompt, moins général que celui des philosophes ; ils avoient à combattre des préjugés moins grossiers, des erreurs plus subtiles. Ils avoient besoin d’éclairer avant de détromper, et d’instruire le bon sens avant de le prendre pour juge.

Mais s’ils n’ont pu faire à l’ensemble de leur doctrine qu’un petit nombre de partisans ; si on a été effrayé de la généralité de leurs maximes, de l’inflexibilité de leurs principes ; s’ils ont nui eux-mêmes à la bonté de leur cause, en affectant un langage obscur et dogmatique, en paroissant trop oublier pour les intérêts de la liberté du commerce, ceux de la liberté politique, en présentant, d’une manière trop absolue et trop magistrale, quelques portions de leur systême qu’ils n’avoient point assez approfondies ; du moins ils sont parvenus à rendre odieuse et méprisable cette politique lâche, astucieuse et