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entre les besoins et les ressources, et d’où il résulte plus de facilité pour satisfaire les besoins, par conséquent, plus de bien-être quand la richesse augmente, jusqu’à ce qu’ils ayent atteint le terme de son accroissement ; et au contraire, quand la richesse diminue, plus de difficultés, et par conséquent, de la souffrance jusqu’à ce que la dépopulation et les privations ayent ramené le niveau ? Comment, dans cette étonnante variété de travaux et de produits, de besoins et de ressources, dans cette effrayante complication d’intérêts, qui lient la subsistance, le bien-être d’un individu isolé, au systême général des sociétés, qui le rend dépendant de tous les accidens de la nature, de tous les événemens de la politique, qui étend en quelque sorte au globe entier sa faculté d’éprouver, ou des jouissances, ou des privations ; comment, dans ce chaos apparent, voit-on néanmoins, par une loi générale du monde moral, les efforts de chacun pour lui-même servir au bien-être de tous, et malgré le choc extérieur des intérêts opposés, l’intérêt commun exiger que chacun sache entendre le sien propre, et puisse y obéir sans obstacle ?