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François imagina, qu’en faisant brûler les protestans, et en protégeant leurs chefs en Allemagne, il conserveroit l’amitié du pape, sans perdre des alliés utiles.

Mais ce ne fut pas leur seul motif ; le despotisme a aussi son instinct ; et cet instinct avoit révélé à ces rois que les hommes, après avoir soumis les préjugés religieux à l’examen de la raison, l’étendroient bientôt jusqu’aux préjugés politiques ; qu’éclairés sur les usurpations des papes, ils finiroient par vouloir l’être sur les usurpations des rois ; et que la réforme des abus ecclésiastiques, si utile à la puissance royale, entraîneroit celle des abus plus oppresseurs sur lesquels cette puissance étoit fondée. Aussi, aucun roi d’une grande nation ne favorisa volontairement le parti des réformateurs. Henri VIII, frappé de l’anathème pontifical, les persécutoit encore ; Édouard, Élisabeth, ne pouvant s’attacher au papisme sans se déclarer usurpateurs, établirent en Angleterre la croyance et le culte qui s’en rapprochoient le plus. Les monarques protestans de la Grande-Bretagne ont favorisé constamment le catholicisme, toutes les fois