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de leur morale, et dont ils n’avoient pu cacher entièrement la connoissance au peuple.

Il s’éleva donc contre eux des réclamations puissantes. Dans le midi de la France, des provinces entières se réunirent pour adopter une doctrine plus simple, un christianisme plus épuré, où l’homme, soumis à la divinité seule, jugeroit, d’après ses propres lumières, de ce qu’elle a daigné révéler dans les livres émanés d’elle.

Des armées fanatiques, dirigées par des chefs ambitieux, dévastèrent ces provinces. Les bourreaux, conduits par des légats et des prêtres, immolèrent ceux que les soldats avoient épargnés. On établit un tribunal de moines, chargé d’envoyer au bûcher quiconque seroit soupçonné d’écouter encore sa raison.

Cependant, ils ne purent empêcher cet esprit de liberté et d’examen de faire sourdement des progrès. Réprimé dans le pays où il osoit se montrer, où plus d’une fois l’intolérante hypocrisie alluma des guerres sanglantes, il se reproduisoit, il se répandoit