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d’avoir généralisé l’usage de l’algèbre, borné chez les Grecs à une seule classe de questions. Si la recherche chimérique d’un secret de transformer les métaux, et d’un breuvage d’immortalité, souilla leurs travaux chimiques, ils furent les restaurateurs, ou plutôt les inventeurs de cette science, jusqu’alors confondue avec la pharmacie ou avec l’étude des procédés des arts. C’est chez eux qu’elle paroît, pour la première fois, comme analyse des corps dont elle fait connoître les élémens, comme théorie de leurs combinaisons, et des lois auxquelles ces combinaisons sont assujetties.

Les sciences y étoient libres, et ils durent à cette liberté d’avoir pu ressusciter quelques étincelles du génie des Grecs ; mais ils étoient soumis à un despotisme consacré par la religion. Aussi cette lumière ne brilla-t-elle quelques momens que pour faire place aux plus épaisses ténèbres ; et ces travaux des Arabes auroient été perdus pour le genre humain, s’ils n’avoient pas servi à préparer cette restauration plus durable, dont l’Occident va nous offrir le tableau.