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gente humanité, la simplicité de ses mœurs, l’élévation de son ame et de son caractère, ses talens, son courage, son génie militaire, l’éclat de ses victoires, tout sembloit lui promettre le succès. On ne pouvoit lui reprocher que de montrer pour une religion, devenue ridicule, un attachement indigne de lui, s’il étoit sincère ; mal-adroit par son exagération, s’il n’étoit que politique ; mais il périt au milieu de sa gloire, après un règne de deux années. Le colosse de l’empire romain ne trouva plus de bras assez puissant pour le soutenir ; et la mort de Julien brisa la seule digue, qui pût encore s’opposer au torrent des superstitions nouvelles, comme aux inondations des barbares.

Le mépris des sciences humaines étoit un des premiers caractères du christianisme. Il avoit à se venger des outrages de la philosophie ; il craignoit cet esprit d’examen et de doute, cette confiance en sa propre raison, fléau de toutes les croyances religieuses. La lumière des sciences naturelles lui étoit même odieuse et suspecte ; car elles sont très-dangereuses pour le succès des miracles ; et il n’y a point de religion qui ne