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La réunion de tant de peuples sous une même domination, l’étendue des deux langues qui se partageoient l’empire, et qui toutes deux étoient familières à presque tous les hommes instruits, ces causes, agissant de concert, devoient contribuer sans doute à répandre les lumières sur un plus grand espace avec plus d’égalité. Leur effet naturel devoit être encore, d’affoiblir peu-à-peu les différences qui séparoient les sectes philosophiques, de les réunir en une seule, qui choisiroit dans chacune, les opinions les plus conformes à la raison, celles qu’un examen réfléchi avoit le plus confirmées. C’étoit même à ce point que la raison devoit amener les philosophes, lorsque l’effet du temps sur l’enthousiasme sectaire permettroit de n’écouter qu’elle. Aussi trouve-t-on déjà, dans Sénèque, quelques traces de cette philosophie : elle ne fut même jamais étrangère à la secte académique, qui parut se confondre presque entièrement avec elle ; et les derniers disciples de Platon furent les fondateurs de l’éclectisme.

Presque toutes les religions de l’empire avoient été nationales. Mais toutes aussi