Page:Condorcet - Réflexions sur l’esclavage des nègres, 1781.djvu/110

Cette page a été validée par deux contributeurs.
98
Réflexions

damnés. Ce ſont les philoſophes qui ont voulu abolir les corvées, & c’eſt encore leur faute ſi, malgré le rétabliſſement de cette méthode, elle s’éteint peu-à-peu ; à peine, en ſubſtituant un impôt aux corvées, a-t-on pu ſauver de leurs mains deſtructives le juſte & antique uſage de n’en faire tomber le poids que ſur les roturiers. Qui eſt-ce qui oſe ſe plaindre en France de la barbarie des loix criminelles, de la cruauté avec laquelle les proteſtans François ſont privés des droits de l’homme & du citoyen, de la dureté & de l’injuſtice des loix ſur la contrebande & ſur la chaſſe ? ce ſont les philoſophes. Qui a pu avoir la coupable hardieſſe de prétendre qu’il ſeroit utile au peuple & conforme à la juſtice de rendre la liberté au commerce & à l’induſtrie ? Quels ſont ceux qui ont réclamé, pour chaque propriétaire, le droit illimité de diſpoſer de ſes forces ? On voit bien que ce ſont ſûrement les philoſophes. Et ſi quelques personnes ont pouſſé la ſcélérateſſe juſqu’à dire à l’oreille, que le roi, en rendant la liberté aux ſerfs du domaine public, devoit com-