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quand les mœurs sont corrompues, de conserver l’institution la plus propre à les corrompre davantage, et de l’impossibilité de constituer une grande république. Quant à ces honteuses et perfides insinuations, qu’il est de l’intérêt particulier de la capitale de conserver un roi et une liste civile ; à cette opposition que l’on cherche à faire naître entre la capitale et les provinces, comme si la liberté et l’égalité n’étoient pas aujourd’hui le premier de leurs vœux et de leurs besoins. Quant à ce reproche de vouloir une république, après avoir juré de maintenir la constitution monarchique : à cette maxime de la tyrannie et de l’inquisition qui, prétant à un serment la force d’engager les pensées comme les actions, voudroit qu’on eût promis, non d’exécuter la loi, mais de la trouver bonne ; non d’obéir mais de croire. Nous ne ferons pas à ces objections l’honneur de les refuter, bien moins encore répondrons nous à ces lâches calomnies que répandent contre nous cette foule de parleurs ou d’écrivains mercenaires, qui ont de si bonnes raisons pour trouver qu’il ne peut y avoir de bon gouvernement sans une liste civile ; et nous leur permettrons de traiter de fous ceux qui ont le malheur de penser comme les sages de tous les tems et de toutes les nations.

C’est à ceux à qui, dans ce moment, la nation françoise a confié le droit de lui proposer une constitution qu’il appartient de déterminer quelle forme, après un événement qui a débarrassé le peuple de ses engagemens avec le monarque, il convient de donner au pouvoir exécutif. Ils doivent aux citoyens d’examiner cette grande question avec toute la liberté, toute la mâturité que mérite une décision qui peut avancer ou reculer de quelques générations, les progrès de l’espèce humaine.

Jusqu’à ce moment ils n’ont rien préjugé encore. En se reservant de nommer un gouverneur au dauphin, ils n’ont pas prononcé que cet enfant. dût régner ; mais seulement qu’il étoit possible