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s’il est utile aux hommes d’être trompés ?

ne peut étre utile aux hommes d’être trompés.

II, III. La recherche de la vérité est difficile à l’homme, et ses passions peuvent l’empêcher de se conduire d’après son intérêt réel et permanent. Ne pourrait-on pas suppléer à l’un de ces inconvénients en joignant ces vérités à des erreurs spéculatives, qu’on ferait adopter au peuple ? Ne pourrait-on point remédier au second, en fortifiant les intérêts raisonnables de se bien conduire par des motifs fondés sur des opinions erronées ?

Dans le premier cas, on croit des vérités utiles d’après des principes faux. Dans le second, on pourrait abandonner la vérité à la discussion de la raison ; mais ce que la raison aurait déclaré vrai, on se croirait obligé de s’y conformer par des motifs erronés.

Ces deux questions doivent être discutées séparément.

II. La première mérite peu de nous arrêter. Cette opinion a deux inconvénients trop frappants, pour qu’on puisse hésiter de proscrire cette espèce d’erreur.

Le premier, que les hommes qui s’apercevraient de la fausseté de ces opinions seraient exposés à rejeter avec elles les vérités auxquelles on aurait donné cette base trop fragile.

Le second, qu’il est presque impossible que les hommes chargés de maintenir dans le peuple ces fausses opinions, destinées à être l’appui de la vérité, ne s’en servent pour établir à sa place des erreurs dangereuses.

III. La seconde question est plus importante ; la