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Vie de M. Turgot

abandonner dans la conversation, ni en défendre séparément quelque partie isolée. Ces opinions elles-mêmes n’étaient pas connues ; il n’existait en Europe qu’un très-petit nombre d’hommes en état d’en saisir l’ensemble et de les juger ; et comme il ne s’agissait pas de découvertes isolées sur une seule science, d’ouvrages soumis au public, comment l’opinion entraînée par le préjugé aurait-elle pu le juger avec justice ?

Ainsi, l’homme qui n’a fait que du bien put avoir encore beaucoup d’ennemis ; et la réputation d’un citoyen vertueux, intrépide, ayant de l’esprit et des connaissances étendues, était auprès du vulgaire tout ce qu’on accordait à un des hommes les plus extraordinaires que la nature ait produits, à celui qui, peut-être, a été le moins éloigné de la perfection à laquelle la nature humaine peut s’élever.

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