son appui pour lui obtenir un titre d’associé libre
dans l’Académie des sciences, et pour entrer dans
celle des belles-lettres, places qu’il ambitionnait
alors comme un asile contre l’armée des critiques
hebdomadaires, que la police oblige à respecter les
corps littéraires, excepté lorsque des corps ou des
particuliers plus puissants croient avoir intérêt de
les avilir, en les abandonnant aux traits de ces méprisables ennemis.
Voltaire alla donc à Berlin ; et le même prince qui le dédaignait, la même cour où il n’essuyait plus que des désagréments, furent offensés de ce départ. On ne vit plus que la perte d’un homme qui honorait la France, et la honte de l’avoir forcé à chercher ailleurs un asile. Il trouva dans le palais du roi de Prusse la paix et presque la liberté, sans aucun autre assujettissement que celui de passer quelques heures avec le roi, pour corriger ses ouvrages et lui apprendre les secrets de l’art d’écrire. Il soupait presque tous les jours avec lui. Ces soupers, où la liberté était extrême, où l’on traitait avec une franchise entière toutes les questions de la métaphysique et de la morale, où la plaisanterie la plus libre égayait ou tranchait les discussions les plus sérieuses, où le roi disparaissait presque toujours pour ne laisser voir que l’homme d’esprit, n’étaient pour Voltaire qu’un délassement agréable. Le reste du temps était consacré librement à l’étude.
Il perfectionnait quelques-unes de ses tragédies, achevait le Siècle de Louis XIV, corrigeait la Pucelle, travaillait à son Essai sur les mœurs et l’esprit des