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VIE DE VOLTAIRE.

lina y est un scélérat, mais qui cherche à excuser ses vices sur l’exemple et ses crimes sur la nécessité. L’énergie républicaine et l’âme des Romains ont passé tout entières dans le poëte.

Voltaire avait un petit théâtre, où il essayait ses pièces. Il y joua souvent le rôle de Cicéron. Jamais, dit-on, l’illusion ne fut plus complète ; il avait l’air de créer son rôle en le récitant ; et quand, au cinquième acte, Cicéron reparaissait au sénat, quand il s’excusait d’aimer la gloire, quand il récitait ces beaux vers :

Romains, j’aime la gloire, et ne veux point m’en taire ;
Des travaux des humains c’est le digne salaire.
Sénat, en vous servant il la faut acheter :
Qui n’ose la vouloir n’ose la mériter,


alors le personnage se confondait avec le poëte. On croyait entendre Cicéron ou Voltaire avouer et excuser cette faiblesse des grandes âmes.

Il n’y avait qu’un beau rôle dans l'Électre de Crébillon, et c’était celui d’un personnage subalterne. Oreste, qui ne se connaît pas, est amoureux de la fille d’Égisthe, qui a le malheur de s’appeler Iphianasse. L’implacable Électre a un tendre penchant pour le fils d’Égisthe ; c’est au milieu des Furies qui conduisent au parricide un fils égaré et condamné par les dieux à cette horrible vengeance, que ces insipides amours remplissent la scène.

Voltaire sentit qu’il fallait rendre Clytemnestre intéressante par ses remords, la peindre plus faible que coupable, dominée parle cruel Égisthe, mais