Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée
56
VIE DE VOLTAIRE.


espèce de mode, et presque regarder comme un honneur d’être déshonorées par lui ; qui avait étabi parmi ses imitateurs une sorte de galanterie où l’amour n’était plus même le goût du plaisir, mais la vanité de séduire ; ce même homme qu’on vit ensuite contribuer à la gloire de Fontenoi, affermir la révolution de Gênes, prendre Mahon, forcer une armée anglaise à lui rendre les armes ; et lorsqu’elle eut rompu ce traité, lorsqu’elle menaçait ses quartiers dispersés et affaiblis, l’arrêter par son activité et son audace ; et qui vint ensuite reperdre dans les intrigues de la cour, et dans les manœuvres d’une administration tyrannique et corrompue, une gloire qui eût pu couvrir les premières fautes de sa vie.

Le duc de Richelieu avait été l’ami de Voltaire dès l’enfance. Voltaire, qui eut souvent à s’en plaindre, conserva pour lui ce goût de la jeunesse, que le temps n’efface point, et une espèce de confiance que l’habitude soutenait plus que le sentiment ; et le maréchal de Richelieu demeura fidèle à cet ancien attachement, autant que le permit la légèreté de son caractère, ses caprices, son petit despotisme sur les théâtres, son mépris pour tout ce qui n’était pas homme de la cour, sa faiblesse pour le crédit, et son insensibilité pour tout ce qui était noble ou utile.

Il servit alors Voltaire auprès de madame de Châteauroux ; mais M. de Maurepas n’aimait pas Voltaire. L’abbé de Chaulieu avait fait une épigramme contre Œdipe, parce qu’il était blessé qu’un jeune homme, déjà son rival dans le genre des poésies