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VIE DE VOLTAIRE.


révolter par des horreurs dégoûtantes, était la satire du genre dont il avait l’orgueil de se croire le créateur et le modèle.

Ce ne fut qu’en 1751 que M. d’Alembert, nommé, par M. le comte d’Argenson, pour examiner Mahomet, eut le courage de l’approuver, et de s’exposer, en même temps, à la haine des gens de lettres ligués contre Voltaire, et à celle des dévots ; courage d’autant plus respectable, que l’approbateur d’un ouvrage n’en partageant pas la gloire, il ne pouvait avoir aucun autre dédommagement du danger auquel il s’exposait, que le plaisir d’avoir servi l’amitié et préparé un triomphe à la raison.

Zulime n’eut point de succès, et tous les efforts de l’auteur pour la corriger, et pour en pallier les défauts, ont été inutiles. Une tragédie est une expérience sur le cœur humain, et cette expérience ne réussit pas toujours, même entre les mains les plus habiles. Mais le rôle de Zulime est le premier au théâtre où une femme passionnée, et entraînée à des actions criminelles, ait conservé la générosité et le désintéressement de l’amour. Ce caractère si vrai, si violent et si tendre, eût peut-être mérité l’indulgence des spectateurs, et les juges du théâtre auraient pu, en faveur de la beauté neuve de ce rôle, pardonner à la faiblesse des autres, sur laquelle l’auteur s’était condamné lui-même avec tant de sévérité et de franchise.

Les Discours sur l’homme sont un des plus beaux monuments de la poésie française. S’ils n’offrent point un plan régulier comme les Épitres de Pope,