Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/547

Cette page n’a pas encore été corrigée
533
SUR VOLTAIRE.


inutiles les talents de ceux qui, assez riches pour avoir reçu une bonne éducation, manquent de l’illustration nécessaire pour arriver aux places. Les privilèges en argent, comme ceux de la noblesse française, sont une des principales causes de la mauvaise administration des finances et de la misère du peuple. Ces privilèges, ces prérogatives, obtenus par la force ou par l’intrigue, ont trouvé, au bout d’un certain temps, des hommes qui en ont fait l’apologie, et ont voulu en prouver l’utilité. C’est le sort de toutes les mauvaises institutions ; ceux qui les ont faites seraient bien étonnés des motifs qu’on leur prête, et de tout l’esprit qu’on leur suppose.

Séparateur


PRÊTRES [1].


Les prêtres excitèrent plus d’une fois le peuple d’Athènes contre les philosophes, et cette fureur ne fut fatale qu’à Socrate. Mais le repentir suivit bientôt le crime, et les accusateurs furent punis. On peut donc prétendre, avec raison, que les Grecs ont été tolérants, surtout si on les compare à nous, qui avons immolé à la superstition des milliers de victimes, par des supplices recherchés et en vertu de lois permanentes ; à nous, dont la sombre fureur s’est perpétuée pendant plus de quatorze siècles sans interruption ; à nous enfin, chez qui les lumières ont plutôt arrêté que détruit le fanatisme qui s'im-

  1. Voltaire, tome XVI, p. 116.