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SUR VOLTAIRE.


vernements. Il aurait fallu dire, dans ce sens, que l’honneur et la vertu sont le principe des républiques, l’honneur seul celui des monarchies ; mais il y aurait eu encore une autre observation à faire : c’est qu’il existe dans toute constitution où le bien est possible, un esprit public, un amour de la patrie différent du patriotisme républicain ; cet esprit public tient à l’intérêt que tout homme qui n’est point dépravé prend nécessairement au bonheur des hommes qui l’entourent, au penchant naturel que les hommes ont pour ce qui est juste et raisonnable. Une mauvaise constitution, un établissement mal dirigé, choquent l’esprit, comme une table dont les pieds n’auraient pas la même forme choquerait les yeux. Il fallait donc se borner à dire que l’amour du bien public n’est pas le même dans les monarchies que dans les républiques ; qu’il est dans ces dernières plus actif, plus habituel, plus répandu ; mais que dans les monarchies il est souvent plus éclairé, plus pur, moins contraire à la morale universelle.

Une opinion susceptible de tant de sens différents, et qui dans aucun n’est rigoureusement exacte, ne peut guère être utile pour apprendre à juger des effets bons ou mauvais d’une loi.


Sur l’opinion de Montesquieu, relativement à la conquête de l’Amérique[1].


Les conquêtes en Amérique et les mines du Pérou enrichirent d’abord les rois d’Espagne ; mais les

  1. Voltaire, tome XLV, p. 389