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NOTES


l’autorité absolue. En France, sous Louis XIII, les ministres protestants les plus éclairés écrivirent pour exhorter les peuples à obéir aux lois du prince ; n’exceptant que les cas où les lois ordonnent positivement une action contraire à la loi de Dieu. Mais on se plaisait à les contraindre à ce qu’ils regardaient comme des actes d’idolâtrie. On les forçait, par une foule de petites injustices, à se jeter entre les bras des factieux ; tandis qu’il n’aurait fallu qu’exécuter fidèlement l’édit de Nantes, pour ôter à ces factieux l’appui des réformés. Cet édit de Nantes, à la vérité, ressemblait plus à une convention entre deux partis, qu’à une loi donnée par un prince à ses sujets. Une tolérance absolue aurait été plus utile à la nation, plus juste, plus propre à conserver la paix, qu’une tolérance limitée ; mais Henri IV n’osa l’accorder, pour ne pas déplaire aux catholiques ; et les protestants ne comptaient point assez sur son autorité, pour se contenter d’une loi de tolérance, quelque étendue qu’elle pût être.

Il eut été facile à Richelieu, et plus encore à Louis XIV, de réparer ce désordre en étendant la tolérance accordée par l’édit, et en détruisant tout le reste. Mais Richelieu avait eu le malheur de faire quelques mauvais ouvrages de théologie, et les protestants les avaient réfutés. Louis XIV, élevé, gouverné par des prêtres dans sa jeunesse, entouré de femmes qui joignaient les faiblesses de la dévotion aux faiblesses de l’amour, et de ministres qui croyaient avoir besoin de se couvrir du manteau de l’hypocrisie, ne put jamais soulever un coin du bandeau que la superstition avait jeté