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SUR VOLTAIRE.


que pendant très-peu de temps ; les billets tombèrent. Il prit alors un second moyen ; on contraignit à recevoir les billets de banque comme argent comptant. Ceux qui remboursèrent leurs dettes avec ces billets eurent le profit des banqueroutes, dont ils partageaient l’honneur avec le ministère. Mais cette contrainte ne peut exister dans les opérations de commerce. Le marchand qui vend sa denrée argent comptant, est le maître de la donner à meilleur marché que s’il la vend en billets. Ainsi ce moyen, injuste en lui-même, ne put ni soutenir suffisamment les billets, ni avoir longtemps de l’influence.

Law, jusque-là, était un homme persuadé faussement que l’établissement d’une banque augmentait les richesses réelles, et que dans le cas où il la fondait, elle devait anéantir la dette publique. Peu délicat sur les moyens, il avait été injuste et charlatan ; mais il pouvait paraître habile aux yeux de ceux qui n’étaient point assez éclairés pour sentir qu’il ne pouvait résulter de son système, en lui supposant tout le succès possible, que l’existence d’une compagnie maîtresse des impôts et des privilèges de commerce, une banque très-compliquée, enfin, une banqueroute faite au hasard, et sans que les pertes fussent proportionnelles, ce qui la rendait encore plus injuste et plus funeste.

Mais, à cette dernière époque, toute cette habileté apparente disparut. Il imagina d’abord de dégoûter de l’argent comptant par des variations rapides dans les monnaies. L’argent monnayé devenant par ce moyen d’un usage incommode, et ceux qui avaient