Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/469

Cette page n’a pas encore été corrigée
455
SUR VOLTAIRE.


bre pour la législation française, à laquelle les étrangers ne font déjà que trop de reproches.

Le comte de Lally a laissé un fils, né d’un mariage secret. Il apprit en même temps sa naissance, la mort horrible de son père, et l’ordre qu’il lui donnait de venger sa mémoire. Forcé d’attendre sa majorité, tout ce temps fut employé à s’en rendre digne. Enfin, l’arrêt fatal fut cassé, au rapport de M. Lambert, par le conseil, qui fut effrayé de la foule des violations des formes légales qui avaient précédé et accompagné ce jugement. M. de Voltaire était mourant lorsqu’il apprit cette nouvelle ; elle le tira de la léthargie où il était plongé : Je meurs content, écrivit-il au jeune comte de Lally, je vois que le roi aime la justice.

Le parlement de Normandie fut chargé de revoir le procès ; la haine pour Lally ne subsistait plus que dans le cœur de ce ramas de brigands qui jouissaient à Paris du fruit des rapines qu’ils avaient exercées dans l’Inde. L’opinion publique avait changé, et le parlement de Paris se conduisit avec la modération et la dignité convenable à des juges qui savent que ce n’est pas l’erreur, mais la partialité qui peut les déshonorer. Le neveu d’un des employés de la compagnie crut devoir, au parlement de Paris et à la mémoire de son oncle, qui lui avait prescrit le contraire, de se rendre partie dans un procès qui lui était étranger. Le parlement de Rouen admit son intervention, que toutes les lois devaient l’obliger de rejeter. Le conseil fut forcé de casser encore cet arrêt, et de renvoyer de nouveau le jugement au