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VIE DE VOLTAIRE.


vie, tandis qu’un homme étranger au christianisme pleure Zaïre, dont le cœur, égaré par sa tendresse pour son père, s’immole au préjugé superstitieux qui lui défend d’aimer un homme d’une secte étrangère ; et c’est là le chef-d’œuvre de l’art. Pour quiconque ne croit point aux livres juifs, Athalie n’est que l’école du fanatisme, de l’assassinat et du mensonge. Zaïre est, dans toutes les opinions comme pour tous les pays, la tragédie des cœurs tendres et des âmes pures.

Elle fut suivie d'Adélaïde du Guesclin, également fondée sur l’amour, et où, comme dans Zaïre, des héros français, des événements de notre histoire, rappelés en beaux vers, ajoutaient encore à l’intérêt ; mais c’était le patriotisme d’un citoyen qui se plaît à rappeler des noms respectés et de grandes époques, et non ce patriotisme d’antichambre, qui depuis a tant réussi sur la scène française.

Adélaïde n’eut point de succès. Un plaisant du parterre avait empêché de finir Mariamne, en criant : La reine boit ; un autre fit tomber Adélaïde, en répondant : Couci-couci, à ce mot si noble, si touchant de Vendôme : Es-tu content, Couci ?

Cette même pièce reparut sous le nom du Duc de Foix, corrigée moins d’après le sentiment de l’auteur que sur les jugements des critiques ; elle réussit mieux. Mais lorsque, longtemps après, les trois coups de marteau du Philosophe sans le savoir eurent appris qu’on ne sifflerait plus le coup de canon d'Adélaïde ; lorsqu’elle se remontra sur la scène, malgré Voltaire, qui se souvenait moins des beautés