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NOTES


balterne, et les détails de cette corruption, furent la première école de Colbert. Le cardinal le recommanda, en mourant, au roi, comme un homme qui lui serait utile.

Le premier soin de Colbert fut de chercher à perdre Fouquet. Il lui était aisé de montrer à Louis XIV que ce ministre n’était qu’un homme vain, uniquement occupé de soutenir ses profusions par des moyens ruineux, et ne sachant qu’emprunter. Mais ce n’était pas sa disgrâce, c’était sa perte que ses ennemis voulaient, parce que Fouquet, disgracié, eût pu éclairer le roi sur la conduite passée de Colbert et des autres ministres.

Cependant Fouquet était procureur général, et ne pouvait être jugé que par le parlement. Ce droit n’est, à la vérité, que le droit commun de tout citoyen ; mais il est bien moins facile de le violer contre un procureur général. On persuada à Fouquet de vendre sa charge, et d’en faire porter le prix au trésor royal. La voix publique accusa Colbert de cette perfidie. On peignit ensuite Fouquet à Louis XIV comme un homme dangereux, qui avait fait fortifier Belle-Ile, qui avait des trésors, des troupes et des partisans. Louis le crut. L’indiscrétion de Fouquet, qui avait voulu acheter mademoiselle de la Vallière, dans le temps même où elle résistait au roi, lui rendaient le surintendant odieux.

La perte de Fouquet fut donc résolue, et l’on employa, pour l’arrêter, une dissimulation qu’on aurait à peine pardonnée à Henri III, s’il eût voulu faire arrêter le duc de Guise, tant on avait trompé