sentation d’une tragédie élèvent l’âme, l’épurent, la tirent de cette apathie, de cette personnalité, maladies auxquelles l’homme riche et dissipé est condamné par la nature. Les spectacles forment en quelque sorte un lien entre la classe des hommes qui pensent et celle des hommes qui ne pensent
point. Ils adoucissent l’austérité des uns, et tempèrent
dans les autres la dureté qui naît de l’orgueil
et de la légèreté. Mais, par une fatalité singulière,
dans le pays où l’art du théâtre a été porté au plus
haut degré de perfection, les acteurs, à qui le public
doit le plus noble de ses plaisirs, condamnés par la
religion, sont flétris par un préjugé ridicule.
Voltaire osa le combattre. Indigné qu’une actrice célèbre, longtemps l’objet de l’enthousiasme, enlevée par une mort prompte et cruelle, fût, en qualité d’excommuniée, privée de la sépulture, il s’éleva, et contre la nation frivole qui soumettait lâchement sa tête à un joug honteux, et contre la pusillanimité des gens en place qui laissaient tranquillement flétrir ce qu’ils avaient admiré. Si les nations ne se corrigent guère, elles souffrent du moins les leçons avec patience. Mais les prêtres, à qui les parlements ne laissaient plus excommunier que les sorciers et les comédiens, furent irrités qu’un poëte osât leur disputer la moitié de leur empire ; et les gens en place ne lui pardonnèrent point de leur avoir reproché leur indigne faiblesse.
Voltaire sentit qu’un grand succès au théâtre pouvait seul, en lui assurant la bienveillance publique, le défendre contre le fanatisme. Dans le pays où