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SUR VOLTAIRE.


eurent longtemps des lois écrites qui admettaient la composition pour le meurtre. Solon se contenta donc de défendre cette turpitude entre les citoyens et les esclaves ; les Athéniens pouvaient sentir les motifs politiques de cette défense, et s’y soumettre : c’était d’ailleurs contre les esclaves seuls, et pour les empêcher de corrompre les jeunes gens libres, que cette loi avait été faite ; et les pères de famille, quelles que fussent leurs mœurs, n’avaient aucun intérêt de s’y opposer.

La sévérité des mœurs des femmes dans la Grèce, l’usage des bains publics, la fureur pour les jeux où les hommes paraissaient nus, conservèrent cette turpitude de mœurs, malgré les progrès de la société et de la morale. Lycurgue, en laissant plus de liberté aux femmes, et par quelques autres de ses institutions, parvint à rendre ce vice moins commun à Sparte que dans les autres villes de la Grèce.

Quand les mœurs d’un peuple deviennent moins agrestes, qu’il connaît les arts, le luxe, les richesses, s’il conserve ses vices, il cherche du moins à les voiler. La morale chrétienne, en attachant la honte aux liaisons entre les personnes libres, en rendant le mariage indissoluble, en poursuivant le concubinage par des censures, avait rendu l’adultère commun ; comme toute espèce de volupté était également un péché, il fallait bien préférer celui dont les suites ne peuvent être publiques, et par un renversement singulier, on vit de véritables crimes devenir plus communs, plus tolérés et moins honteux dans l’opinion que de simples faiblesses. Quand les Occidentaux com-