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SUR VOLTAIRE.


de la propriété, île la liberté de disposer de la personne et des biens. Mais s’il y existe de ces distinctions, de ces pouvoirs, alors l’intérêt de chacun est de chercher à sortir de la classe du peuple, que toutes les autres oppriment ; l’ambition, la vanité, devient donc alors le principe dominant.

Si le peuple est ignorant, alors la sûreté personnelle, la propriété des biens, le maintien de ses usages, sont les seules choses qui lui soient chères ; il ne diffère des habitants d’un autre pays que parce qu’il a de ses droits une idée moins étendue, moins complète.

L’intérêt de tout gouvernement est d’avoir l’autorité entière, et d’être paisible et assuré. Il ne doit donc pas choquer ce principe d’intérêt qui est le mobile de la nation ; au contraire, il le respectera et cherchera à en faire l’instrument de ses projets. Ainsi, par exemple, dans un gouvernement comme l’Angleterre, les lois s’occuperont du maintien des droits des hommes ; il en sera de même dans une monarchie, d’autant plus que la nation sera plus éclairée, et qu’il y aura moins de distinction entre les hommes, que le ressort de la vanité sera plus affaibli.

Dans les aristocraties, on veillera à maintenir l’égalité entre les membres du souverain, et en même temps à les empêcher d’opprimer chacun en particulier ; on affectera d’autant plus la justice, qu’on sera plus souvent obligé de la violer pour affermir le pouvoir du sénat. On donnera à l’oppression l’apparence de la règle ; on évitera surtout de laisser