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PHILOSOPHIE DE NEWTON.


terre se nient dans les cieux ; tandis qu’en cinquante pages bien commodes à lire, on peut savoir, sans la moindre peine, quand et comment la terre, les planètes, les comètes, etc., etc., ont été formées.

M. de Voltaire attaqua la manie des systèmes ; et c’est un service important qu’il a rendu aux sciences. Cet esprit de système nuit à leurs progrès, en présentant à la jeunesse des routes fausses où elle s’égare, en enlevant aux vrais savants une partie de la gloire qui doit être réservée aux travaux utiles et solides. Prétendre qu’il a répandu le goût des sciences, c’est dire que la Princesse de Clèves et les Anecdotes de la cour de Philippe-Auguste ont encouragé l’étude de l’histoire ; c’est confondre la connaissance des sciences avec l’habitude de prononcer des mots scientifiques, l’amour de la vérité avec la passion des fables, et le goût de l’instruction avec la vanité de paraître instruit. Cette manie des systèmes nuit enfin au progrès de la raison en général, qu’elle corrompt, en apprenant aux hommes à se contenter de mots, à prendre des hypothèses pour des découvertes, des phrases pour des preuves, et des rêves pour des vérités.

Les ouvrages où M. de Voltaire s’éleva contre cette philosophie sont donc utiles, malgré quelques erreurs ; car les erreurs particulières sont peu dangereuses, et ce sont seulement les fausses méthodes qui sont funestes.

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