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PHILOSOPHIE DE NEWTON.

M. Euler joignit à sa pièce la formule de la vitesse du son que Newton avait cherchée en vain ; et cette addition étrangère, mais fort supérieure à l’ouvrage même, paraît avoir décidé les juges du prix.

Les deux autres pièces, l’une du jésuite Lozérande-de-Fiesc, et l’autre de M. le comte de Créqui-Canaples, sont d’un genre différent : l’un explique tout par les petits tourbillons de Malebranche ; l’autre, par deux courants contraires d’un fluide éthéré. L’honneur que reçurent ces pièces prouve combien la véritable physique, celle qui s’occupe des faits, et non des hypothèses, celle qui cherche des vérités, et non des systèmes, était alors peu connue, même dans l’Académie des sciences. Un reste de cartésianisme, qu’on trouvait dans un ouvrage, paraissait presque un mérite qu’il fallait encourager. Cette sagesse, avec laquelle Newton s’était contenté de donner une loi générale qu’il avait découverte sans chercher la cause première de cette loi, que, ni l’étude des phénomènes, ni le calcul, ne pouvaient lui révéler ; cette sagesse ramenait, disait-on, dans la physique, les qualités occultes des anciens, comme s’il n’était pas plus philosophique d’ignorer la cause d’un fait que de créer, pour l’expliquer, des tourbillons, des courants et des fluides.

Les pièces de madame du Châtelet et de M. de Voltaire sont les seules où l’on trouve des recherches de physique, et des faits précis et bien discutés. Les juges des prix, en leur accordant cet éloge, déclarèrent qu’ils ne pouvaient approuver l’idée qu’on y donnait de la nature du feu ; déclaration