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POLITIQUE ET LÉGISLATION.


POLITIQUE ET LÉGISLATION.


Parmi le grand nombre des hommes de lettres d’un mérite supérieur qui ont illustré le siècle de Louis XIV, il n’en est aucun qui se soit occupé de législation, d’économie politique, de jurisprudence, etc. Fénelon a envisagé ces objets en moraliste plu lût qu’en politique : Boisguilbert, qui parmi ses erreurs a répandu dans ses ouvrages plusieurs vérités utiles et nouvelles, n’était qu’un écrivain obscur, inconnu aux gens de lettres de la capitale : l’abbé de Saint-Pierre n’était regardé que comme un bon homme avec d’excellentes intentions ; il inondait le public de projets aussi mal écrits d’impraticables, et l’on ne faisait grâce à ses opinions politiques qu’en faveur de la liberté de ses idées sur la religion. Il n’y a point cependant d’objets plus dignes d’occuper les hommes, et sur lesquels il soit plus utile d’éclairer le peuple.

Lorsque l'Esprit des lois parut, en 1750, les ouvrages de Melon, de Dutot, et surtout celui de Cantillon sur le commerce, enfin, quelques-uns des écrits de l’abbé de Saint-Pierre, étaient les seuls livres français, sur les sciences politiques, qui fussent entre les mains des gens de lettres.

M. de Voltaire ne partageait point, même dans sa jeunesse, leur indifférence sur ces grands objets. Comme il s’était instruit sur la physique avec Graesande et Newton, sur la métaphysique, avec Locke, Clarke et Collins, il étudia en Angleterre les