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LA PUCELLE D’ORLÉANS.


médecin appelé auprès d’un pestiféré, s’occuper gravement à le guérir d’un cor au pied.

Il ne sera peut-être pas inutile d’examiner ici pourquoi l’on attache tant d’importance à l’austérité des mœurs : 1° dans les pays où les hommes sont féroces et où il y a de mauvaises lois, l’amour ou le goût du plaisir produisent de grands désordres ; et il a toujours été plus facile de faire des déclamations que de bonnes lois ; 2° les vieillards, qui naturellement possèdent toute l’autorité et dirigent les opinions, ne demandent pas mieux que de crier contre des fautes qui sont celles d’un autre âge ; 3° la liberté des mœurs détruit le pouvoir des femmes, les empêche de l’étendre au-delà du terme de la beauté ; 4° la plupart des hommes ne sont ni voleurs, ni calomniateurs, ni assassins. Il est donc très-naturel que partout les prêtres aient voulu exagérer les fautes de mœurs. Il y a peu d’hommes qui en soient exempts ; la plupart même mettent de l’amour-propre à en commettre, ou du moins à en avoir envie ; de manière que tout homme à qui on a inspiré des scrupules sur cet objet, devient l’esclave du pouvoir sacerdotal.

Les prêtres peuvent laisser en repos la conscience des grands sur leurs crimes, et, en leur inspirant des remords sur leurs plaisirs, s’emparer d’eux, les gouverner, et faire, d’un voluptueux, un persécuteur ardent et barbare.

Ils n’ont que ce moyen de se rendre maîtres des femmes qui, pour la plupart, n’ont à se reprocher que des fautes de ce genre. Ils s’assurent par là un