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VIE DE VOLTAIRE.


taire dans ces sociétés, et particulièrement dans celle du duc de Sully, du marquis de la Fare, de l’abbé Servien, de l’abbé de Chaulieu, de l’abbé Courtin. Le prince de Conti, le grand prieur de Vendôme, s’y joignaient souvent.

M. Arouet crut son fils perdu, en apprenant qu’il faisait des vers et qu’il voyait bonne compagnie ; il voulait en faire un magistrat, et il le voyait occupé d’une tragédie. Cette querelle de famille finit par faire envoyer le jeune Voltaire chez le marquis de Châteauneuf, ambassadeur de France en Hollande.

Son exil ne fut pas long : madame du Noyer, qui s’y était réfugiée avec ses deux filles, pour se séparer de son mari, plus que par zèle pour la religion protestante, vivait alors, à la Haye, d’intrigues et de libelles, et prouvait, par sa conduite, que ce n’était pas la liberté de conscience qu’elle y était allée chercher.

M. de Voltaire devint amoureux d’une de ses filles ; la mère, trouvant que le seul parti qu’elle pût tirer de cette passion était d’en faire du bruit, se plaignit à l’ambassadeur, qui défendit à son jeune protégé de conserver des liaisons avec mademoiselle du Noyer, et le renvoya dans sa famille, pour n’avoir pas suivi ses ordres.

Madame du Noyer ne manqua pas de faire imprimer cette aventure, avec les lettres du jeune Arouet à sa fille, espérant que ce nom, déjà très-connu, ferait mieux vendre le livre ; et elle eut soin de vanter sa sévérité maternelle et sa délicatesse, dans le libelle même où elle déshonorait sa fille.

On ne reconnaît point dans ces lettres la sensibi-