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OEDIPE.

L'abbé de Chaulieu fit une mauvaise épigramme contre cette approbation : il disait que l’on connaissait la Motte pour un mauvais auteur, mais non pour lui faux prophète. C’est ainsi que les grands hommes sont traités au commencement de leur carrière ; mais il ne faut pas que tous ceux que l’on traite de même s’imaginent pour cela être de grands hommes. La médiocrité insolente éprouve les mêmes obstacles que le génie, et cela prouve seulement qu’il y a plusieurs manières de blesser l’amour-propre des hommes.

La première édition d'Œdipe fut dédiée à Madame, femme du régent. Voici cette dédicace : elle ressemble aux épîtres dédicatoires de ce temps-là. Ce ne fut qu’après son voyage en Angleterre, et lorsqu’il dédia Brutus à lord Bolingbroke, que celle de M. de Voltaire montra qu’on pouvait, dans une dédicace, parler à celui qui la reçoit, d’autre chose que de lui-même.


« Madame,

Si l’usage de dédier ses ouvrages à ceux qui en jugent le mieux n’était pas établi, il commencerait par Votre Altesse Royale. La protection éclairée dont vous honorez le succès ou les efforts des auteurs, met en droit ceux même qui réussissent le moins, d’oser mettre sous votre nom des ouvrages qu’ils ne composent que dans le dessein de vous plaire. Pour moi, dont le zèle tient lieu de mérite auprès de vous, souffrez que je prenne la liberté de vous offrir les faibles essais de ma plume. Heureux si, encouragé