Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 4.djvu/190

Cette page n’a pas encore été corrigée
176
VIE DE VOLTAIRE.

L’histoire de ce qui s’est fait en Europe en faveur de la raison et de l’humanité, est celle de ses travaux et de ses bienfaits. Si l’usage absurde et dangereux d’enterrer les morts dans l’enceinte des villes, et même dans les temples, a été aboli dans quelques contrées ; si, dans quelques parties du continent de l’Europe, les hommes échappent par l’inoculation à un fléau qui menace la vie et souvent détruit le bonheur ; si le clergé des pays soumis à la religion romaine a perdu sa dangereuse puissance, et va perdre ses scandaleuses richesses ; si la liberté de la presse y a fait quelques progrès ; si la Suède, la Russie, la Pologne, la Prusse, les États de la maison d’Autriche ont vu disparaître une intolérance tyrannique ; si même en France, et dans quelques États d’Italie, on a osé lui porter quelques atteintes ; si les restes honteux de la servitude féodale ont été ébranlés en Russie, en Danemark, en Bohême et en France ; si la Pologne même en sent aujourd’hui l’injustice et le danger ; si les lois absurdes et barbares de presque tous les peuples ont été abolies, ou sont menacées d’une destruction prochaine ; si partout on a senti la nécessité de réformer les lois et les tribunaux ; si dans le continent de l’Europe les hommes ont senti qu’ils avaient le droit de se servir de leur raison ; si les préjugés religieux ont été détruits dans les premières classes de la société, affaiblis dans les cours et dans le peuple ; si leurs défenseurs ont été réduits à la honteuse nécessité d’en soutenir l’utilité politique ; si l’amour de l’humanité est devenu le langage commun de tous les gouvernements ; si les guerres sont devenues