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VIE DE VOLTAIRE.

teurs et des juges. C’est en promettant l’immortalité qu’il demandait justice.

L'arrêt de Toulouse fut cassé. Le duc de Choiseul eut la sagesse et le courage de faire renvoyer à un tribunal de maîtres des requêtes, cette cause devenue celle de tous les parlements dont les préjugés et l’esprit de corps ne permettaient point d’espérer un jugement équitable. Enfin Calas fut déclaré innocent. Sa mémoire fut réhabilitée ; et un ministre généreux fit réparer, par le trésor public, le tort que l’injustice des juges avait fait à la fortune de cette famille aussi respectable que malheureuse. Mais il n’alla point jusqu’à forcer le parlement de Languedoc à reconnaître l’arrêt qui détruisait une de ses injustices : ce tribunal préféra la triste vanité de persévérer dans son erreur, à l’honneur de s’en repentir et de la réparer.

Cependant les applaudissements de la France et de l’Europe parvinrent jusqu’à Toulouse ; et le malheureux David, succombant sous le poids du remords et de la honte, perdit bientôt la raison et la vie. Cette affaire, si grande en elle-même, si importante par ses suites, puisqu’elle ramena, sur les crimes de l’intolérance et la nécessité de les prévenir, les regards et les vœux de la France et de l’Europe ; cette affaire occupa l’âme de Voltaire pendant plus de trois années. Durant tout ce temps, disait-il, il ne m’est pas échappé un sourire, que je ne me le sois reproché comme un crime. Son nom, cher depuis longtemps aux amis éclairés de l’humanité, comme celui de son plus zélé, de son plus infatigable défenseur,