une retraite, des secours, et surtout des consolations.
Elle s’arrête auprès de Genève. Voltaire, attendri
et indigné, se fait instruire de ces horribles détails ;
et bientôt, sûr de l’innocence du malheureux
Calas, il ose concevoir l’espérance d’obtenir justice.
Le zèle des avocats est excité, et leur courage soutenu
par ses lettres. Il intéresse à la cause de l’humanité
l’âme naturellement sensible du duc de Choiseul.
La réputation de Tronchin avait appelé à Genève
la duchesse d’Enville, arrière-petite-fille de l’auteur
des Maximes, supérieure à la superstition par
son caractère comme par ses lumières, sachant faire
le bien avec activité comme avec courage, embellissant,
par une modestie sans faste, l’énergie de ses
vertus ; sa haine pour le fanatisme et pour l’oppression
assurait aux Calas une protectrice dont les obstacles
et les lenteurs ne ralentiraient pas le zèle. Le
procès fut commencé. Aux mémoires des avocats,
trop remplis de longueurs et de déclamations. Voltaire
joignait des écrits plus courts, séduisants par le
style, propres tantôt à exciter la pitié, tantôt à réveiller l’indignation publique, si prompte à se calmer
dans une nation alors trop étrangère à ses propres
intérêts. En plaidant la cause de Calas, il soutenait
celle de la tolérance ; car c’était beaucoup alors de
prononcer ce nom, rejeté aujourd’hui avec indignation
par les hommes qui pensent, comme paraissant
reconnaître le droit de donner des chaînes à la pensée
et à la conscience. Des lettres remplies de ces
louanges fines qu’il savait répandre avec tant de
grâce, animaient le zèle des défenseurs, des
protect-
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VIE DE VOLTAIRE.