riche, consentait à lui faire. Jamais, dans un événement
de ce genre, un tel concours de circonstances
n’avait plus éloigné les soupçons d’un crime, plus
fortifié les raisons de croire à un suicide. La conduite
du jeune homme, son caractère, le genre de ses
lectures, tout confirmait cette idée. Cependant un
capitoul, dont la tête ardente et faible était enivrée
de superstition, et dont la haine pour les protestants
n’hésitait pas à leur imputer des crimes, fait arrêter
la famille entière. Bientôt la populace catholique
s’échauffe ; le jeune homme est un martyr. Des confréries
de pénitents qui, à la honte de la nation, subsistent
encore à Toulouse, lui font un service solennel,
où l’on place son image tenant d’une main la
palme du martyre, et de l’autre la plume qui devait
signer l’abjuration.
On répand bientôt que la religion protestante prescrit aux pères d’assassiner leurs enfants, quand ils veulent abjurer ; que, pour plus de sûreté, on élit, dans les assemblées du désert, le bourreau de la secte. Le tribunal inférieur, conduit par le furieux David, prononce que le malheureux Calas est coupable. Le parlement confirme le jugement à cette pluralité très-faible, malheureusement regardée comme suffisante par notre absurde jurisprudence. Condamné à la roue et à la question, ce père infortuné meurt, en protestant qu’il n’est pas coupable ; et les juges absolvent sa famille, complice nécessaire du crime ou de l’innocence de son chef.
Cette famille, ruinée et flétrie par le préjugé, va chercher chez les hommes d’une même croyance