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VIE DE VOLTAIRE.


échappées à sa plume, et y avait ajouté son immortel Essai sur les mœurs et l'esprit des Nations.

Longtemps Voltaire s’était plaint que, chez les modernes surtout, l’histoire d’un pays fût celle de ses rois ou de ses chefs ; qu’elle ne parlât que des guerres, des traités ou des troubles civils ; que l’histoire des mœurs, des arts, des sciences, celle des lois, de l’administration publique, eût été presque oubliée. Les anciens même, où l’on trouve plus de détails sur les mœurs, sur la politique intérieure, n’ont fait en général que joindre à l’histoire des guerres, celle des factions populaires. On croirait, en lisant ces historiens, que le genre humain n’a été créé que pour servir à faire briller les talents politiques ou militaires de quelques individus, et que la société a pour objet, non le bonheur de l’espèce entière, mais le plaisir d’avoir des révolutions à lire ou à raconter.

Voltaire forma le plan d’une histoire où l’on trouverait ce qu’il importe le plus aux hommes de connaître : les effets qu’ont produits sur le repos ou le bonheur des nations, les préjugés, les lumières, les vertus ou les vices, les usages ou les arts des différents siècles.

Il choisit l’époque qui s’étend depuis Charlemagne jusqu’à nos jours ; mais, ne se bornant pas aux seules nations européennes, un état abrégé de l’état des autres parties du globe, des révolutions qu’elles ont éprouvées. des opinions qui les gouvernent, ajoute à l’intérêt et à l’instruction. C’était pour réconcilier madame du Châtelet avec l’élude de l'his-