même temps. Ces sortes de propositions se font toujours
trop tard ; et, si on les faisait à temps, elles
ne seraient pas d’une politique bien sûre : celui qui
devait être un ennemi dangereux, deviendrait souvent
un allié plus dangereux encore. Supposez Calvin
ou Luther appelés à la pourpre, lorsqu’ils pouvaient
encore l’accepter sans honte, et voyez ce
qu’ils auraient osé. On ne satisfait pas, avec les hochets de la vanité, les âmes dominées par l’ambition
de régner sur les esprits ; on leur fournit des armes
nouvelles.
Cependant Voltaire fut tenté de faire quelques essais de traduction, non pour rétablir sa réputation religieuse, mais pour exercer son talent dans un genre de plus. Lorsqu’ils parurent, les dévots s’imaginèrent qu’il n’avait voulu que parodier ce qu’il avait traduit, et crièrent au scandale. Ils n’imaginaient pas que Voltaire avait adouci et purifié le texte ; que son Ecclésiaste était moins matérialiste, et son Cantique moins indécent que l’original sacré. Ces ouvrages furent donc encore brûlés. Voltaire s’en vengea par une lettre remplie à la fois d’humeur et de gaieté, où il se moque de cette hypocrisie de mœurs, vice particulier aux nations modernes de l’Europe, et qui a contribué plus qu’on ne croit à détruire l’énergie de caractère qui distingue les nations antiques.
En 1767 parut la première édition de ses Œuvres vraiment faite sous ses yeux. Il avait tout revu avec une attention sévère, fait un choix éclairé, mais rigoureux, parmi le grand nombre de pièces fugitives