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ÉLOGE DE PASCAL.


plus pesante. Il était naturel d’imaginer que, dans le temps de pluie, l’air est plus pesant. Aussi Pascal trouvait-il, d’après quelques expériences équivoques, que le baromètre baissait lorsque l’air était chaud, agité et serein, et qu’il haussait lorsqu’il était froid, calme et pluvieux.

L’erreur était d’autant plus difficile à reconnaître, qu’on ignorait alors que les variations du baromètre prédisent souvent celles du temps plutôt qu’elles ne les accompagnent.

Nous n’avons garde de faire à Pascal un reproche de cette erreur, nous la rapportons seulement comme une preuve de la lenteur à laquelle sont nécessairement assujettis les progrès des systèmes fondés sur les faits. Cette lenteur est la source de bien des jugements injustes ; ne pouvant suivre la chaîne des progrès insensibles de l’esprit humain, au milieu des erreurs de chaque siècle et des inutilités dont chaque âge embarrasse la philosophie, la plupart des hommes méconnaissent la lente circonspection du génie, et n’admirent que les sophistes éloquents et prodigues de promesses [1].

A ces expériences sur les fluides, Pascal joignit

  1. La justice nous oblige d’observer que dans tout ce récit, l’auteur de l’éloge accorde beaucoup à Descartes, tandis que les éditeurs de Pascal lui ont presque tout refusé. Mais on a rapporté dans cet éloge les faits tels qu’ils résultent des lettres de Descartes, et de sa vie écrite par Baillet.

    Les savants italiens trouveront sans doute qu’on est ici trop favorable aux deux philosophes français, et peut-être auront-ils raison.