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ÉLOGE DE PASCAL.


s’étaient à peine écoulés depuis la mort de Descartes, que déjà Newton avait deviné le secret de la nature qui avait échappé à Descartes, et corrigé les fautes de ce philosophe. L’histoire même des travaux de Pascal nous présente une observation qui prouve à la fois et combien la marche des sciences fut alors rapide, et combien ceux qui parlent en juges des sciences qu’ils n’entendent pas, s’exposent à se rendre ridicules. Pascal avait reconnu, en 1647, l’horreur du vide pour une cause naturelle ; cependant, lorsque le traité de l’équilibre des liqueurs fut imprimé, en 1663, les éditeurs, qui, comme tous les hommes animés de l’esprit de parti, ne veulent pas reconnaître la moindre imperfection dans leurs héros, disent, dans leur préface, que Pascal n’avait garde de soutenir une doctrine aussi absurde que celle de l’existence du vide. Ils ne pouvaient pas deviner que vingt ans après seulement (en 1687), l’opinion de l’existence du vide reparaîtrait dans Newton avec une nouvelle force ; en sorte que s’il n’y a point de preuve convaincante qu’il existe dans la nature un vide absolu, du moins est-on trop avancé maintenant pour croire que des raisonnements métaphysiques puissent en prouver l’impossibilité. Cependant, Pascal apprit enfin que Toricelli avait eu la même idée que Descartes sur la cause de la suspension des liqueurs. Il crut alors devoir s’assurer, par des expériences, de la vérité de ces conjectures. Descartes lui avait proposé de porter un baromètre au haut d’une montagne, et l’avait assuré que le mercure y serait sensiblement