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ÉLOGE DE PASCAL.


prix au mérite d’avoir démontré, avec un peu plus d’élégance, ce qu’Apollonius avait découvert quinze siècles auparavant. D’ailleurs, le traité des sections coniques pouvait n’être qu’une compilation que le jeune géomètre aurait faite des leçons de son père et de Desargues, et c’est ainsi qu’en jugea Descartes. Il s’obstina à le regarder comme un ouvrage des maîtres de Pascal, où il lui était impossible de distinguer ce qui appartenait à leur écolier.

Pascal était alors à Rouen, où bientôt il se montra digne de sa réputation par une invention brillante ; et ce n’était plus l’ouvrage d’un enfant qui donne des espérances. A dix-neuf ans, il conçut l’idée d’une machine arithmétique, et la fit exécuter. On sait que les règles d’arithmétique réduisent à des opérations techniques tous les calculs de cette science, et que l’addition, la soustraction et la multiplication des nombres simples sont les seules opérations qui restent à faire à l’esprit. Mais la simplicité de ces opérations devient elle-même un inconvénient. L’esprit se lasse bientôt de ces opérations tant répétées et si monotones ; elles ne peuvent ni se passer de l’attention de celui qui les fait, ni la captiver. Une machine arithmétique n’a pas les mêmes inconvénients : toutes les opérations y sont purement techniques, à peu près comme dans la méthode de calculer par les jetons, et dans celle que le Gentil a trouvée chez les brahmes, et par laquelle ils exécutent, avec tant de promptitude et de sûreté, les calculs les plus compliqués. Avec une de ces machines, le géomètre, l’astronome feraient eux-mêmes, avec