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ÉLOGE DE PASCAL.

tendre à la gloire. Lié avec Fermat et Roberval, il s’unit quelquefois avec eux pour combattre Descartes ; au reste, respectant un grand homme persécuté, il ne voulut point mêler sa voix à celle de Voétius, et de ces écrivains maintenant oubliés ou méprisés, mais alors écoutés et dangereux, qui ne pardonnaient pas à Descartes le bien que sa philosophie devait faire aux hommes. Étienne Pascal, après avoir combattu Descartes avec honnêteté, voulut devenir son ami ; et il le fut jusqu’à la mort de ce grand homme.

Quoique Étienne Pascal eût entièrement renoncé aux affaires, il fut obligé de quitter Paris en 1638. Un de ses amis s’était vu forcé de s’opposer au cardinal de Richelieu, alors tout-puissant, et qui savait également violer les formes, ou les faire servir à sa vengeance. Cette résistance de l’ami de Pascal fut regardée comme un crime, et punie par la prison. Pascal n’abandonna point un ami malheureux ; il osa même attester publiquement son innocence ; il réfuta la basse calomnie, qui cherche toujours des crimes à ceux qui sont opprimés. Il alla enfin jusqu’à défendre ceux qui avaient eu le même courage que son ami, et qu’on appelait ses complices. La conduite de Pascal fut présentée au chancelier Séguier comme un attentat contre l’autorité : car le mérite modeste et obscur a encore des ennemis ; et Pascal, sachant que le plus sûr moyen de suspendre l’activité de la haine est de soustraire à ses regards l’objet qui l’excite, se retira à la campagne. Il n’y fut pas longtemps : les vices de Richelieu n’étaient