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PRÉFACE.


bien rare aujourd’hui, de n’être point infecté de l’esprit de parti ; et cela était difficile, en parlant d’un homme qui ne peut être indifférent pour aucun parti. Jansénistes, molinistes, croyants, incrédules, tous virent dans Pascal un défenseur ou un adversaire.

L’auteur de cet éloge trouve quelques défauts dans le style des Provinciales, et il a osé le dire. Il serait injuste de lui en faire un reproche : plus un homme a laissé une réputation imposante, plus il est utile d’avertir les jeunes gens des fautes qui lui sont échappées, et c’est pour les jeunes gens qu’il faut écrire. Les hommes du monde ne lisent que pour s’amuser : les gens de lettres cherchent dans les livres des matériaux pour leurs ouvrages. Mais les jeunes gens, dont les opinions ne sont pas encore fixées, dont l’âme se laisse entraîner à toutes les impressions ; les jeunes gens, qui n’ont point encore appris à se défier ni des livres, ni des hommes, prennent, sans s’en douter, les idées, les sentiments des auteurs qu’ils lisent. Ainsi les préjugés, une fois consacrés dans les livres classiques, se transmettent de génération en génération.