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ÉLOGE DE L'HÔPITAL.


latan de séduire le peuple, qu’à un homme de génie de le sauver.


Législation de l’Hôpital.


Mais c’est surtout dans ce qu’il entreprit pour la réforme de la magistrature et pour celle des lois, qu’il faut voir le chancelier de l’Hôpital ; c’est là qu’on peut le juger lui et son siècle.

On jugera de la corruption de ce siècle, par les abus honteux auxquels l’Hôpital se vit forcé d’opposer des lois. On verra comment l’ignorance alors générale des principes de la législation l’obligea de remédier à chaque désordre par des lois particulières, au lieu de chercher dans un système de bonnes lois des moyens simples de tarir à la fois la source de tous les désordres. On reconnaîtra dans l’Hôpital ce mélange de grandeur et de petitesse, de vues profondes et d’erreurs grossières, qui, dans les siècles d’ignorance, caractérise le génie.

Chez les peuples anciens, où chaque nation habitait le sol sur lequel elle s’était civilisée, où tous les individus sortis d’une origine commune avaient les mêmes opinions et les mêmes mœurs, où les lois, faites d’après ces mœurs et ces opinions, n’étaient que l’expression des règles sous lesquelles chaque citoyen avait jugé qu’il lui serait utile de vivre, où la constitution s’était formée en suivant le progrès de la civilisation, et n’était qu’un système de moyens approuvés du peuple pour maintenir à la fois sa liberté et sa sûreté ; chez ces peuples, la législation