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ÉLOGE DE L'HÔPITAL.


mériter ces noms exécrables, réservés par la postérité aux rois qui ont versé sans nécessité le sang de leurs peuples : voyez à quels maux affreux une nouvelle guerre civile va réduire un royaume épuisé d’habitants, sans industrie, sans agriculture. Jamais vous ne parviendrez à détruire une secte composée de plusieurs millions d’hommes réduits au désespoir, et qui savent combattre ; mais quand, devenu sourd à la voix de la raison et de l’humanité, vous seriez assez malheureux pour ne plus être sensible qu’à vos intérêts, que n’avez-vous point à craindre pour vous-même, si, par un malheur dont aucune prudence ne peut vous garantir, une bataille perdue livre le royaume entre les mains des protestants ? »

La voix de l’Hôpital ne faisait plus sur l’esprit de Charles IX qu’un effet passager ; cependant, il obtint des conférences pour la paix. Les protestants ont l’imprudence de demander à la fois la liberté de conscience et une diminution d’impôts qui eût entraîné la réforme des déprédations dans les finances. La cour est indignée : en vain, pour la calmer, les protestants déclarent qu’ils se bornent à la liberté de conscience. Les courtisans sentent trop que Coligny serait encore plus à craindre pour eux dans le conseil qu’à la tête des protestants, et la guerre continue [1]. La cour est forcée bientôt après de

  1. Le connétable qui, à quatre-vingts ans, ordonnait la guerre civile, fut tué à la bataille de Saint-Denis, par un Écossais nommé Stuart, qui l’avait pris à la bataille de Dreux. On donna le